Un Vide pas si vide.
Tout autour de nous, dans le mouvement de la Vie, nous avons l’impression que le Vide ne se cantonne qu’à des situations expérimentales très précises ou bien alors à l’Espace. Or, si l’on regarde attentivement, il s’avère que le Vide «remplit» 99,99% de la matière. En effet, tout est constitué d’atomes, eux-mêmes constitués d’un noyau et d’un nuage d’électrons… et de vide. Si l’on pouvait supprimer la totalité du vide au sein des atomes, alors toute la matière sur Terre tiendrait dans une sphère de 100 mètre de rayon. Il y a donc une omniprésence du Vide sur lequel il est intéressant de mettre de la conscience.
Le Vide, état de la matière et de l’esprit
Pour commencer, qu’est-ce que le vide ? Il est important de différencier le Vide du Néant.
– « Le Vide est ce qui reste quand on a tout enlevé, sauf le Vide. » (Etienne Klein). Le Vide est. On pourrait grossièrement le comparer à ce que la sphère est à la boule. Le Vide est opposé au Plein.
– Le Néant de son côté correspond à la non-existence, au Rien absolu. Le Néant n’est pas. Pour revenir à la comparaison de la boule, le Néant est l’absence de boule. Le Néant est opposé à l’Être.
Opposé au plein, c’est une constatation relative d’un état d’un objet ou d’une personne à 2 instants différents. Quand on dit qu’un verre est vide, on compare son état soit à une expérience passée, soit à une potentialité que l’on connaît. Il a déjà été plein, ou il peut être plein.
C’est ce que l’on retrouve en mathématique dans les « ensembles vides ». L’espace virtuel des chiffres est face à une absence de valeurs alors que potentiellement, il pourrait en contenir.
Pour les personnes, on assiste à une approche similaire. Quand elles se sentent vides, il est question soit d’énergie (fatigue, apathie), soit de désir (ennui, mélancolie) ou de sens (désespoir). On se compare à des états que l’on a déjà expérimenté ou à une potentialité que l’on sent nous manquer.
Le Vide, Force d’attraction
Aristote disait « La Nature a le vide en horreur ». Cela pourrait signifier que dès que le vide est créé ou sur le point d’être créé, la Nature s’y oppose ou le comble.
On trouve cette idée dans la dynamique des fluides avec les gradients de pression. Le vide va « chercher » à se combler et à équilibrer les pressions. On retrouve le même principe avec les gradients de concentration dans les liquides. Lorsque 2 liquides miscibles sont mis en présence l’un de l’autre, si un élément ou ion est absent dans l’un d’eux, alors cet élément va se répartir uniformément. C’est le phénomène d’osmose. Le Vide revêt donc un symbole de recherche d’équilibre.
Chez les Bouddhistes Godai, Le Vide (kū) est l’élément dans lequel évoluent tous les autres, il est associé au Ciel, à l’espace. Chez les Grecs de l’Antiquité, le vide est l’équivalent de l’éther, fluide subtil emplissant tout l’espace. Le vide est alors un milieu dans lequel tout peut se mouvoir.
Quand on « fait le vide » en soi, on se met en condition pour ne plus être perturbé intérieurement par les milieux extérieurs et intérieurs. La médiation est une pratique permettant cela. En ne s’accrochant ni à nos pensées ni à nos stimuli sensoriels, on affine notre réceptivité et l’on peut alors accueillir ce qui émerge naturellement de soi. C’est l’Inspiration voire l’Illumination. Du vide naît le plein.
Les chamanes utilisent un procédé proche : en état de conscience modifiée, ils se font « os creux », pour pouvoir accueillir les Esprits en eux, et qu’ils puissent agir par leurs corps physiques. Certains mediums traversent des expériences similaires. En repoussant notre égo, on devient plus sensible et réceptif au monde subtil.
Néanmoins, il est important de discerner « faire le vide en soi » et « se vider la tête ».
La première expression est une démarche active d’écoute de soi, une phase de repli avant un mouvement. C’est un état Yin précédant un état Yang.
La seconde expression consiste à se couper de ses sensations. C’est une démarche passive d’anesthésie, d’oblitération du mental, une phase de repli avant une immobilisation. C’est un état Yin figé.
Faire le vide en soi va donc au-delà du simple exercice d’isolement. C’est un moyen de se sentir connecté à plus grand, à l’immatériel, à des ressources insoupçonnées.
Le Vide, ouverture aux champs des possibles
Selon l’approche quantique d’ Einstein, le Vide correspond au niveau d’énergie minimal pour que le monde matériel puisse exister. Ainsi, il suffirait de donner la moindre quantité d’énergie au vide pour créer « ex-nihilo » des éléments. On y retrouve encore la notion de potentialité.
Un physicien de notre époque, Nassim Haramein, continue au-delà avec sa théorie des champs unifiés. Il change de postulat de base de manière à ce que la matière ne détermine pas l’espace mais que l’espace détermine la matière. Ainsi l’information contenue dans le Vide serait une sorte de code informatique pour manifester la matière. La question est donc, qui ou quoi écrit le code ? Il serait question de Volonté et/ou d’Intelligence, et donc supposer soit que l’Univers est Intelligent, soit qu’il y a quelque chose au-delà de l’Univers qui est Intelligent.
Et pourtant depuis des millénaires, ces notions se retrouvent chez les Hindouistes. Le vide y porte le nom Ākāśa, qui est aussi l’espace et le son. Il est ainsi l’interface entre le matériel (discontinu et séparé) et l’immatériel (continu et omniprésent) par le support du son. Il est intéressant de voir comment cette approche fait écho à « Au commencement était le Verbe » de l’Evangile selon Saint Jean.
En associant ces différentes facettes on comprend que le vide est un état d’énergie minimal précurseur de la matière, où tout est information, et qu’il incite à un mouvement pour être rempli. On pourrait presque y deviner une sorte Volonté de création.
Le Vide ne serait-il alors pas juste le voile qui sépare le Grand Tout, purement énergétique et spirituel, du Manifesté, matérialisé ?
– Sébastien Mahé